Et si le télétravail était en fait plus favorable au partage des grandes idées?
Petit retour en 2006. Il est 9 h (OK, il est 9 h 32) et, après un trajet au centre-ville à rendre n’importe qui claustrophobe, vous êtes finalement assis au bon vieux bureau physique de votre agence de marketing.
L’époque est tellement plus simple. Les ascenseurs sonnent. Des dosettes de café bien trop faible infusent dans la cuisine. Mais il y a du boulot à faire. Et donc, dans une tentative désespérée de limiter les distractions pendant au moins 45 minutes, vous commencez votre séance de travail comme vous le faites pratiquement tous les matins.
En ouvrant Spotify et en branchant vos écouteurs; tout comme la moitié des gens à votre bureau.
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Depuis la pandémie, le célèbre effet « machine à café » a fait l’objet d’innombrables discussions. L’argument ressemble à ceci : en travaillant à la maison, on rate toutes les occasions de rencontrer par hasard des collègues et d’avoir avec eux des conversations informelles; le type de conversations qui, supposément, propulsent les grosses idées révolutionnaires.
Les manchettes sont accablantes. « Le télétravail tue la créativité et l’innovation » (en anglais) selon un article publié dernièrement dans The Guardian, qui indique que « les meilleures entreprises vont retourner au bureau – c’est la seule façon pour les travailleurs de saisir l’ambiance et d’aligner de manière optimale leurs interactions. » (notre traduction)
De nombreux PDG prestigieux semblent être du même avis (en anglais) Le travail à distance est un « tueur de la culture d’entreprise », selon Marc Metrick, de Saks. Des sentiments similaires ont été exprimés par Tim Cook d’Apple et par Jamie Dimon de JPMorgan, qui affirme que « ça ne fonctionne tout simplement pas pour générer des idées de manière spontanée. »
Ces arguments semblent sensés. Mais sont-ils vrais?
Dans une entrevue récente accordée au New York Times (en anglais), le professeur à Harvard Ethan Bernstein, qui s’est intéressé à ce sujet, a affirmé que le concept de productivité par pure chance est « plus un conte de fées qu’une réalité. »
« … si on met des gens dans des espaces où ils ont des chances de se croiser, ils ont des chances d’avoir une conversation… mais est-ce que cette conversation a des chances de contribuer à l’innovation, à la créativité… ou d’avoir une quelconque utilité pour l’entreprise? Il n’y a pratiquement aucune donnée à ce sujet. »
En fait, une étude réalisée en 2019 (en anglais) indiquait que les bureaux à aire ouverte entraînaient 70 % moins d’interactions en face à face, comparativement aux bureaux avec cubicules, suggérant ainsi que, lorsqu’on leur enlève leur intimité, de nombreuses personnes ont davantage besoin de se cacher.
Je peux te parler une seconde?
On est maintenant en 2016. Vous travaillez sur une grosse présentation et vous devez lancer quelques idées à votre patronne (extrêmement occupée). Son bureau est à peine à 20 pieds du vôtre, mais, après une série de réunions d’affilée, sa porte tournante est bien fermée. Le signal du non-dit pour « Ne pas déranger ».
Pas de problème. Peut-être allez-vous simplement lancer plutôt quelques idées au collègue du bureau à côté? Celui qui est assis à environ 3 pieds devant vous? Vous le regardez, mais il a ses écouteurs.
Tant pis. Vous ne voulez pas le déranger.
Pour le meilleur et pour le pire, ces indices antisociaux subtils sont largement éliminés dans les environnements virtuels. De nos jours, on peut clavarder instantanément avec notre patron en sachant qu’il verra notre message dès qu’il aura une seconde de libre – et sans imposer aucune interruption physique. Dans ce sens, nos collègues de travail n’ont jamais été aussi accessibles que maintenant. (Peut-être trop accessibles?)
Pour certains, l’art de partager des idées est également beaucoup plus accessible par des canaux virtuels. Pensez à toutes ces personnes qui n’aiment pas parler dans un gros remue-méninges; mais si vous leur demandez quelques idées par courriel après la réunion, ils excellent. Pour ces styles de travail, nos nouveaux arrangements fonctionnent parfaitement.
Mais même à cela, il est difficile d’imaginer la collaboration virtuelle comme un remplacement total ou permanent au travail d’équipe en personne. Les idées se vendent rarement uniquement par un écran. Elles exigent des discussions, de la persuasion et même du matériel de présentation. Et parfois, il n’y a rien qui puisse remplacer la magie de se trouver dans la même pièce – sans oublier notre capacité physique de la quitter à la fin de la journée.
Et il y aurait beaucoup à dire sur les relations humaines importantes d’un point de vue émotionnel que nous créons au bureau, simplement par le fait que nous passons autant de temps ensemble. Une étude américaine (en anglais) a révélé que les employés qui avaient un « meilleur ami au travail » étaient 7 fois plus susceptibles d’être véritablement mobilisés par leur travail. Ce qui amène la question : est-il réaliste de penser que nous pouvons développer le même type de relations interpersonnelles profondes avec des collègues et des clients lorsque nous sommes sur des écrans différents, à des centaines de kilomètres les uns des autres? Peut-être. Mais comme nous l’avons tous appris à la dure au cours des derniers mois, les conversations virtuelles peuvent être un triste substitut aux rencontres en face à face. Et on a pas mal moins de chances de rester pour partager une bière après la réunion.
Alors, de quoi aura l’air la vie dans une agence après la pandémie?
Votre hypothèse est aussi bonne que la nôtre.
Mais il est certain qu’il n’y aura pas de solution noir et blanc pour notre « nouvelle normalité » (tout le monde prend un verre). De nombreuses entreprises, dont Facebook et Shopify, se sont déjà engagées (en anglais) à passer au mode « numérique par défaut », ou à faire du télétravail une option permanente. D’autres insisteront pour qu’on s’assoie dans leurs bureaux.
Chez BAM, notre équipe espère trouver un juste milieu agréable pour tous. Une façon de faire qui convient aux styles de travail de chacun et aux besoins des clients pragmatiques. Parce que s’il y a une chose que nous avons apprise au cours des derniers mois, c’est que nos employés peuvent fournir des résultats exceptionnels, peu importe où ils travaillent.
La pandémie n’a pas été facile. Mais nous avons adopté les remue-méninges numériques avec des émojis de bras ouverts, décroché de nouveaux clients, embauché des humoristes pour des performances sur Zoom, au lieu de vraies soirées au pub. Et peu importe ce qui s’en vient maintenant, nous continuerons à nourrir la culture et la chimie uniques qui ont fait de BAM l’un des meilleurs employeurs au pays en 2021 (en anglais) – même si ça veut dire un peu moins de chiens au bureau, et quelques écrans extra dans nos espaces de pause.
Une chose est sûre cependant : que ce soit un, trois ou cinq jours par semaine, nous avons tout simplement hâte de nous retrouver à nouveau dans la même pièce. Et ça, ça n’a rien à voir avec le travail.